“Généralement, on se moque d’eux. Ils arrivent avec leurs radars datés, leurs tenues de cosmonautes imparfaits et leur vieux van. On aurait du mal à se dire qu’ils sont envoyés par le gouvernement puis on se souvient de l’état du trésor public, et on se dit que c’est déjà incroyable que l’Etat embauche des chasseurs de fantômes. Mais bon, s'ils sont là c'est forcément que quelqu'un les a appelés. En fait, ils ne chassent pas vraiment les fantômes. Si on les écoute, c’est un Groupe d’Etude et de Négociation avec l’Invisible. Le GENI, pour faire court. Ils viennent enquêter sur les lieux hantés dans des “logiques de préservation”, pour protéger leur mémoire et recueillir la voix du génie des lieux avant qu’il ne disparaisse.”

Nous cherchons à compiler, sous couvert de la fiction d’une disparition imminente, tous les lieux qui nous hantent, c’est-à-dire ceux qui sont peuplés des histoires de ce qui a disparu et de ce qui va disparaître. Ceux dont on veut parler sans jamais vraiment pouvoir tout dire à leur sujet. Ceux dont il faut parler avant qu’on les oublie.

Héritiers des missions photographiques de la DATAR, des analyses du GEPAN (Groupe d'études des phénomènes aérospatiaux non identifiés), et de la décentralisation, nous menons des enquêtes morcelées, relevons des indices, composons peu à peu des archives, et racontons, par des performances, des expositions, des sons, des textes, des soirées diapo, une sorte de tour de France des lieux hantés, avant que la mémoire qu’ils portent ne disparaissent.